27 septembre 2014

Ma fille n'aime plus l'école et je la comprends...

Bien sûr que non, je ne lui ai pas dit… C’est entre vous et moi. Mais mon constat est le suivant : l’éducation en fin de secondaire est du bourrage de crâne. Ma fille a fait sa scolarité jusqu’à aujourd’hui dans le système public d’éducation. D’excellentes années au primaire, et de très belles au secondaire… jusqu’à cette année où elle débute son secondaire 4 dans son école à vocation particulière art dramatique où les relations élèves et professeurs ont toujours été très bonnes. Emballée à la veille de la rentrée, elle a rapidement déchanté au bout de deux semaines seulement. J’écoutais ses doléances d’une oreille distraite car une ado est une ado, ça a tendance à rouspéter pour rien…

Sauf que j’ai assisté à la rencontre parents-professeurs organisée à l’école la semaine dernière. Et là, j’ai su et j’ai compris. L’année va être difficile. Les professeurs avaient déjà l’air découragé et à les écouter, je l’étais moi-même. Que s’est-il donc passé ?

J’ai peut-être une explication, que voici. Vers la fin du secondaire 3, les jeunes sont entrés dans le vrai monde, celui de la performance et des modèles de réussite préétablis. Car on leur demandait de faire un choix qui semblait pouvoir avoir des répercussions sur la suite de leur parcours scolaire et sur leur avenir professionnel. Alors toi le jeune, tu choisis TS (mathématique, séquence Technico-sciences) ou CST (mathématique, séquence Culture, société et technique) ? Ce sont les deux voies proposées dans l’école de ma fille. Sachez qu’il existe aussi SN (mathématique, séquence Sciences naturelles), STE (science et technologie de l’environnement de la 4e secondaire) ou SE (science et environnement).

Très vite ont circulé dans les couloirs et entre les élèves des rumeurs sur le fait que la filière TS allait ouvrir les portes de tous les cégeps tandis que la filière CST, bof… Il y avait déjà les bons et les moins bons, il y avait ceux qui réussiront et ceux qui auront des métiers qui ne paieront pas beaucoup. Certes, un grand nombre d’élèves a choisi TS par choix ou par obligation des parents, ce qui a nécessité la création de deux classes ; les autres par choix, ou parce qu’ils ont un niveau en maths plus faible, ont choisi CST et se retrouvent dans une seule classe de 32 élèves. Un melting pot d’apprenants aux nombreux défis (démotivation et troubles d’apprentissage) et aux niveaux de connaissance divers (certains sont passés entre les mailles du filet et les retards se sont alors accumulés au fil des ans). Je conclurai ce tableau bien sombre sur le fait que le secondaire 4 est l’année la plus importante en vue de l’acceptation au cégep et que le programme de l’année est très lourd en raison des exigences du Ministère. Les élèves et leurs professeurs doivent passer au travers une tonne de sujets en l’espace de quelques mois seulement. À côté de cela, les apprenants se coltinent la même matière en histoire, soit celle du Canada et du Québec pendant deux années consécutives. En secondaire 3, elle est étudiée d’un point de vue chronologique, en secondaire 4, elle l’est par thèmes. C’est à n’y rien comprendre.

Assise sur ma chaise de classe lors de cette rencontre avec les professeurs, je me revoyais à l’école à cet âge-là et avec les mêmes défis. On devait également choisir notre parcours. J’avais opté pour la filière lettres et langues étrangères, la « poubelle » pour bon nombre de personnes, notamment les bollés des sciences et maths. Ça fait plus de trente ans et ça n’a donc pas changé… ?

Je ne cherche pas ici à dénoncer le travail des professeurs ni à dénigrer de quelconques difficultés d’apprentissage. Mais je ne peux que constater que la course au diplôme est l’unique raison d’être qui motive ainsi des heures et des heures de bourrage de crânes et d’apprentissages par cœur. Qu’en reste-t-il une fois le diplôme en main ? Le ministère de l’Éducation reste l’instance souveraine qui, du haut de son donjon, impose des prérequis et exige des résultats sans s’adapter aux réalités vécues par les jeunes et à leurs nouvelles connaissances. Parce qu’ils en ont et qu'elles évoluent très vite !

De nos jours, on parle beaucoup d’éducation mais comme valeur marchande uniquement. Or, on aura bien beau réduire les budgets, le problème de fond restera le même : l’école d’aujourd’hui doit être repensée. Elle doit réfléchir à la place qu’elle peut donner à l’élève dans l’élaboration de son propre processus d’apprentissage, elle doit accepter l’introduction de types d’éducation non traditionnels qui pourraient s’arrimer à l’enseignement formel existant. Ma fille, par exemple, n’a jamais été aussi engagée dans un cours d’histoire que le jour où elle et une amie ont décidé de monter une vidéo sur un sujet qu’elles ont choisi, la crise d’Octobre. Recherche de photos, voix hors champ, montage, etc. Le résultat final était bluffant. Plutôt que d’apprendre par cœur ce qu’un professeur ou un livre lui a raconté, elle a puisé elle-même dans les carnets de l’histoire pour créer son récit à elle. 

Alors, oublions un peu les gros sous, et pensons créativité et inventivité.

17 septembre 2014

La seule retraite qui m'intéresse, c'est celle de... Marie-France Bazzo

Mais oui, bien sûr, c’est une blague même si je rêve (non, j’ai l’objectif) d’animer un jour ma propre émission. Et puis, je devrais attendre longtemps car je ne pense pas que mon idole va prendre sa retraite du micro de sitôt. De toute façon, a-t-on vraiment envie de battre en retraite quand on aime ce que l’on fait ? Parlez-en à un certain monsieur Languirand !

Non, je cherchais plutôt une façon légère d’aborder un sujet beaucoup moins drôle, l’épargne pour la retraite. Comme les saisons, les cris d’alarme sur le faible niveau d’épargne des Québécois en vue de leur retraite reviennent régulièrement hanter les bulletins de nouvelles. Qui va payer? L’état pourvoyeur aura-t-il les moyens de soutenir un revenu de retraite décent à sa population vieillissante ? Que faire pour encourager le peuple à épargner toujours plus alors que fondent comme neige au soleil ses meilleures intentions et ses bas de laine ? En plus de précieux conseils, de petites vidéos sont diffusées dans les médias comme autant de petites leçons de vie. Ici, une famille surendettée qui reconnaît vivre au-dessus de ses moyens. Là, un couple qui préfère se priver de sorties au restaurant, de télévision ou d’autres gadgets de communication moderne pour mieux vivre leur passion du voyage.

Oh, bien sûr, je me sens à chaque fois interpellée par le sentiment d’urgence évoqué par les chroniqueurs ou les conseillers financiers. J’ai même l’impression qu’ils s’adressent directement à moi : « Eh toi, oui toi là, c’est bien à toi que l’on s’adresse, tu as la quarantaine bien sonnée et tu n’as pas beaucoup d’épargne ? Mais qu’est-ce que tu attends ? Tu as déjà pris bien du retard. Il est même peut-être trop tard… ».

Hé là là, qu’on est loin du rêve « Liberté 55 » dont certaines générations auront quand même eu la chance de profiter pour se la couler douce dès la mi cinquantaine avec un revenu décent assuré jusqu’à la fin de leurs jours. Les chanceux… Mais de nos jours, à part pour quelques ordres professionnels encore privilégiés, y a-t-il vraiment quelque chose de garanti pour assurer à qui que ce soit une retraite où le petit café du matin aura le délicieux goût du temps qui passe doucement ? En plus de la triste réalité d’aînés de plus en plus nombreux qui vivent une retraite de misère, des manchettes mettent aussi trop souvent à jour le cas de personnes qui sont dépouillées de leur épargne par des malfrats en cravate ou dépossédées d’une partie de leurs épargnes en raison de difficultés financières du régime de retraite de leur employeur. Certains se retrouvant ainsi du jour au lendemain sous le seuil de la pauvreté après avoir travaillé toute leur vie. À ce titre, les prochaines semaines au Québec rappelleront le cas de travailleurs qui doivent se battre pour défendre des gains chèrement acquis. Même si je fais référence ici aux employés municipaux qui ne sont certainement pas les plus à plaindre sur l’échelle de la débandade quant à la retraite grâce  à des régimes de retraite assez généreux, leur lutte pour leurs droits reste légitime.

Je précise « pas les plus à plaindre » car il y a tous les autres, ceux qui n’ont pas de régime de retraite d’employeur, ceux qui n’ont pas de REER ou un tout maigrichon, ni même de petites économies, il y a les précaires, les temporaires, les saisonniers, les employés au salaire minimum, les travailleurs autonomes, bref tous ceux qui font baisser le faible taux de chômage mais qui viennent gonfler la liste des personnes qui vont certainement devoir ramer dur jusqu’à perpète. Dans leurs cas, que signifie vraiment le mot « retraite » ?

De ceux-là, j’en fais partie. Il y a deux ans, j’ai participé à l’émission L’après-midi porte conseil animée par Dominique Poirier sur les ondes de la Première chaîne de Radio-Canada. Ce jour-là, on y parlait de retraite (la preuve que c’est un sujet qui revient régulièrement). « La retraite  ? Je n’y pense pas, bien trop occupée à vivre le moment présent » avais-je indiqué. « Comment puis-je me projeter dans l’avenir alors qu’au moment où je vous parle, mes principales préoccupations sont de m’assurer un niveau de vie décent, de payer mes factures à temps, d’assurer un bon niveau d’études pour ma fille, etc. Mettre de l’argent de côté ? Oui, je le fais quand je le peux et, heureusement, car cela m’est utile pour les petits ou les gros pépins mais aussi pour me payer des petits plaisirs de temps en temps. J’ai bien le droit, non ? ».

Car, comment me projeter 30 ans plus tard alors que je ne sais pas jusqu’à quand je vais devoir travailler. 70 ans ou plus ? Et puis, de quoi sont faits nos lendemains ? On ne le sait pas toujours. Mon père est décédé à la veille de ses 50 ans après avoir travaillé comme un fou et n’avoir profité de rien. Pour ma part, j’ai changé de continent (volontairement) à 28 ans avec l’obligation de recommencer ma vie professionnelle à zéro. Il y a quatre ans, je gagnais 60 000 dollars, deux ans après, mon revenu était de 18 000 dollars parce que j’ai décidé de me lancer à mon compte (on ne le dit pas assez mais ça coûte cher, l’entrepreneuriat… ).

Non, vraiment, j’ai du mal à concevoir le fait de travailler toute ma vie pour assurer une période de celle-ci où je ne serais peut-être plus assez… vivante. Plus d’argent ? Eh bien, j’irais vivre dans un petit village en bord de mer à me nourrir de fruits et de poissons fraîchement pêchés. Ça, c’est un vrai projet de retraite. En plus, je n’aurais pas graissé au passage les revenus d’institutions financières souvent promptes à recevoir votre épargne mais peu à vous épargner des soucis en cas de difficultés passagères. Surtout si vous êtes une mère célibataire monoparentale (bip), locataire (bip, bip) et travailleure autonome (bip, bip, bip)…