Avez-vous déjà remarqué que les générations
d’après-guerre, au-delà de la lettre qui les caractérise, portent toutes un
nom: les baby-boomers, les millenials (les Y), la génération alpha (Z).
Des noms somme toute assez cool. En ce qui concerne la génération X, on parle
plutôt de la génération « crise », « carpette », « sandwich ». Bonjour la
déprime. En fait, la déprime date déjà d'il y a longtemps alors que nous
reprenions à tue-tête les paroles de la chanson Désenchantée de Mylène
Farmer. Nous n’avions pas vingt ans. Est-ce pour cela que cette génération fait
rarement les manchettes des médias traditionnels ou d'affaires ?
Première génération confrontée au chômage de masse en
pleine crise économique au début des années 80, coincée entre la génération des
baby-boomers et celle des Y qui la bouscule, les X n'ont jamais ménagé
leurs efforts pour se faire une petite place et être reconnus à leur juste
valeur. Et elle s’est pas mal essoufflée. Faut dire qu’on lui en a fait des
promesses à cette génération X. On lui promettait la relève de la
génération de baby-boomers qui n'en finissent pas de ne pas partir à la
retraite. En attendant, un nombre grandissant de travailleurs décrochent,
désillusionnés et… trop souvent malades.
Pas certaine qu’ils auront l’énergie ni, surtout,
l’envie de prendre le relais de leurs aînés. Surtout dans les environnements de
travail au sein d'entreprises et d'organisations encore calquées sur le vieux
modèle de la hiérarchie verticale : un chef au sommet de la pyramide, des
tâches et des fonctions bien établies, de lourds processus décisionnels, des
systèmes vieillots pour faire circuler l’information, des communications
tronquées, etc. Pour avoir de l’expérience professionnelle sur les deux
continents, je peux affirmer que si la hiérarchie est maladivement patriarcale
en France, celle au Québec repose sur une soi-disant absence de hiérarchie
pour mieux faire passer certaines pilules… Disons qu’un juste milieu serait
parfait.
En fait, je pense que le monde du travail dans les
entreprises ici ou ailleurs est en grande transition. Or, les transitions sont
souvent des moments de crise et de heurts pour faire arriver le changement, et
elles marquent une frontière entre ceux qui ont connu et ceux qui vont
connaître. Déjà, vous aurez certainement remarqué comme moi une volonté de
quelques entreprises à transformer leur espace de travail (physique et
organisationnel) en un lieu d’épanouissement… surtout pour attirer et motiver
les employés issus de la génération Y qui, eux, revendiquent avec raison le
droit de travailler dans le plaisir et la bonne humeur. Non, non, je ne suis
pas frustrée…
Faut dire que ce sont de véritables
ENTREPRENEURS dans l’âme (des entrepreneurs tripatifs, même !), ces petits
jeunes. Des entrepreneurs bien de leur temps, calés en toutes sortes
de nouvelles technologies, promesses d'un monde moderne, efficace,
productif. Vous avez plus de 45 ans ? «Désolé, nos subventions à
l’entrepreneuriat sont attribuées aux 18 à 35…». Allez, tasse-toi, matante...
Déjà, en 1998 (!), dans son formidable livre La Cité
des Intelligences, l’auteure Sylvie Gendreau proposait des modes
d’organisation du travail avant-gardistes basés sur un leadership démocratique
qui permettrait aux hommes et aux femmes de mettre en commun leur imaginaire et
leur intelligence pour concrétiser un objectif commun. On est en 2016, on en
parle encore. Certaines entreprises – trop peu - y sont parvenues. Bien sûr, on
vante sans cesse l’innovation, l'intelligence collective, la mise en place
de «laboratoires de créativité». Et c’est fort inspirant pour l'avenir,
tous ces concepts. En attendant, la majeure partie des employés continuent à
effectuer leurs tâches comme des robots, en se questionnant sur le sens de tout
ça. Voilà le grand mot : le SENS. Combien sommes-nous à avoir cette
désagréable impression de tourner en rond et cette urgence à retrouver un
sens ? Un jour, on se lève, on jette un regard en arrière sur le travail
accompli jusqu’à aujourd’hui et on se dit : « Mon dieu, s’il faut
continuer comme ça, ça risque d’être long ».
Pour ma part, ça m’est arrivé : ce qu’on appelle «
frapper un mur ». Ça fait plus ou moins mal selon l’épaisseur du mur…
J'ai battu en retraite - non pas à la retraite - pour me poser, pour
arrêter le mouvement alors que j'avais tant besoin de celui-ci. Alors ont
déboulé des tas de questions existentielles : comment en suis-je arrivée là ?
Où me suis-je trompée ? Suis-je en train de passer à côté de ma vie ? Est-il
trop tard ?
J'ai pleuré, j'ai ruminé, j'ai douté, j’ai sombré. J'ai
trouvé des responsables, souvent les autres. Pas facile de démêler ces noeuds
qui avaient affaibli mon cerveau et endolori mon corps tout entier. Certains me
diront que c'est une preuve de force et de courage que de savoir s'arrêter pour
se remettre en question.
Il paraît que je suis en mue. Ce n'est pas moi qui le
dis, c'est Christophe Fauré, psychiatre : « Vers 40-50 ans, nous sommes tous en
mue », une transition plus communément connue sous l'expression « la crise de
la quarantaine ». Je suis rassurée. Il semble donc que je ne sois pas la
seule. Et l'autre bonne nouvelle est que ce monsieur ajoute aussi, je cite, «
que ce temps charnière de l'existence n'annonce pas un déclin, mais l'occasion
de nous épanouir ». L'avenir, c'est donc aujourd'hui !
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